Charles Bukowski est un écrivain américain d'origine allemande, auteur de romans et de poésie, né le 16 août 1920 à Andernach en Allemagne, mort le 9 mars 1994 à Los Angeles en Californie, aux États-Unis. Il est souvent connu sous ses pseudonymes divers : Hank, Buk, Henry Chinaski, ce dernier étant celui de son alter ego dans ses nombreux romans autobiographiques.
Les trois premières années de sa vie se passent en Allemagne, avant que ses parents ne décident d'émigrer aux États-Unis (1923). Il passe dans un contexte de crise économique une enfance marquée par la violence d'un père tyran domestique, battant son fils et son épouse.
Sa mère est femme au foyer et n'a jamais été pour Bukowski que l'image de la femme soumise à l'autorité de son époux, incapable d'intervenir dans les relations conflictuelles du fils et du mari[réf. nécessaire].
Fils unique, Bukowski subit très tôt la haine et la frustration paternelle face à son échec social : régulièrement battu jusqu'à sa seizième année. Son père lui interdit les relations avec les enfants du quartier, trop pauvres, qui reflètent l'image de son propre échec social[réf. nécessaire].
Évitant très tôt ce contexte familial pathologique, Bukowski vit sa prime enfance comme joueur de base-ball de rue. À dix ans, le jeune Bukowski ressent ce qu'il décrit plus tard comme le premier jour de sa vie où il a le sentiment d'être écrivain : forcé d'écrire une rédaction qui serait lue devant toute la classe ( ayant été forcé par son père de ne pas assister à la visite du président Hoover ), il invente de toutes pièces les événements qu'il n'a pas pu voir et, devant le succès de son travail, découvre la puissance des mots.
Au cœur de la crise, le père de Bukowski perd son emploi de livreur de lait, mais continue de longs mois à simuler une vie normale d'honnête travailleur, incapable d'admettre son échec, sa pauvreté, et de tirer un trait sur ses velléités d'honnête homme. C'est à cette même période que Charles découvre le vin et l'ivresse, avec un ami dont le père possède dans sa cave des tonnelets de vin.
L'adolescence de Hank est marquée par un élément ressenti comme majeur, et qui va marquer sa vie future : la survenue brutale d'une acné , qui grêle son visage et son corps de pustules, affectant cruellement ses rapports avec les autres, notamment les femmes (cf. Souvenirs d'un pas grand-chose).
Le jeune Bukowski, enfant turbulent et dominateur, se forge petit à petit un personnage d'exclu, de rejeté social, seulement capable de se faire remarquer par sa laideur. Ses intérêts changent drastiquement : il découvre l'écriture, la poésie.
À cette époque également survient le dernier choc avec son père : à seize ans, Bukowski, rentré ivre d'une sortie, se fait une nouvelle fois réprimander et insulter par son père. Pour la première fois, il rend les coups : les deux hommes se battent sous les yeux de la mère de famille.
Bukowski sort vainqueur de cette confrontation, qui se révèle un catalyseur pour ses choix de vie : il décide de quitter la maison et ce père dont il a pu se venger.
Il ne quitte cependant pas la maison, obtient son certificat de fin d'étude au collège, et tente un premier pas dans le monde du travail, prenant un emploi de magasinier dans une grande surface. Bukowski se fait licencier en quelques jours.
Début 1940, il décide d'entrer à l'université, pour un cursus de journaliste.
Sa vie s'organise autour de l'alcool, de quelques amis, de l'écriture. Son père découvre un de ses manuscrits et jette son fils à la rue.
Les premières années de l'âge adulte de Bukowski cristallisent ses passions et sa personnalité : il vit d'hôtel marginal, vivotant de minuscules emplois et de femmes qu'il ramène sans efforts de ses nombreuses virées nocturnes dans les bars de son quartier. Il erre à travers les États-Unis, cherchant des chambres à proximité d'un bar. Il retourne même habiter chez ses parents, qui, abasourdis par ses activités, racontent à leurs voisins que leur fils est mort.
Bukowski continue d'écrire, entame ses premiers romans autobiographiques, où il parle d'errance, de misère, d'emplois indignes et humiliants, de femmes et d'alcool. Ses tentatives pour placer ses nouvelles dans de petites revues littéraires sont toutes des échecs, mais écrire lui est devenu nécessaire. Il se fend de quelques dollars pour acheter une machine à écrire (très vite prêtée sur gage, faute d'argent). En parallèle, il établit à la bibliothèque municipale le seul havre d'ouverture que sa vie rude peut lui offrir. Il découvre très vite une influence majeure sur sa vie et son style en la personne de John Fante, et notamment son roman Demande à la Poussière. Bukowski s'identifie immédiatement à Bandini, gosse fantasque et roublard, inspiré, excessif, christique et nietzschéen à la fois, comme lui en rupture familiale et en quête de beauté, d'émotions, de sentiments jamais assez forts.Mais, par-dessus tout, le style de Fante impressionne Bukowski : sa capacité à verbaliser les émotions, à les surinvestir et à en faire le moteur majeur de son personnage (lui aussi très autobiographique).
En quelques années, alors que sa vie amoureuse et de travailleur sont très chaotiques, il continue d'éplucher la littérature (en particulier la Beat generation, mais aussi Ernest Hemingway, Louis-Ferdinand Céline, Albert Camus, les auteurs russes, notamment Dostoïevski), découvre la musique classique (Gustav Mahler, qui ne le quittera plus jamais), continue à écrire des poèmes et des pages autobiographiques.
Sa vie est alors axée autour d'une chambre d'hôtel miteuse, d'un job alimentaire et inintéressant, où les rapports féodaux entre cadres et employés nourrissent ardemment l'écriture de Bukowski, et de la quête d'alcool et de femmes pour tout oublier. Bukowski, à 25 ans, est déjà devenu l'ivrogne obsédé sexuel, instable et chaotique. Il part pour New York. L'expérience est dure. Il rentre à Los Angeles désabusé, pense au suicide, cesse d'écrire. Cette passe dure 10 ans.
A 26 ans, il rencontre Jane Cooney Baker dans un bar. Une femme de 10 ans son aînée, ravagée par l'alcool, avec un parcours plus chaotique encore que celui de Bukowski. Ils vont rester ensemble une dizaine d'années.
Il entre à 32 ans à la poste, pour quelques semaines, pense-t-il, en attendant de vivre de sa plume. Il y reste 3 ans.
Ses velléités littéraires sont alors toujours au point mort : bien qu'il arrive à publier quelques poèmes et chroniques dans des revues Beat underground, rien de substantiel ne lui permet de quitter son job de facteur. Bien au-delà de ces contingences matérielles, il continue tout de même à dépeindre l'infamie quotidienne, exploite le filon de son boulot de facteur, boit toujours plus. Il développe un ulcère, se fait interdire la boisson, et découvre à cette période les courses hippiques.
Jane, elle, continue à boire. Sa santé décline, leur relation se dégrade, ils finissent par rompre.
Il publie alors pour la première fois des poèmes dans une petite revue, dont il finit par épouser la rédactrice en chef, une texane, fille de grands propriétaires, en adoration devant le talent qu'elle devine chez Bukowski. Ils restent ensemble deux ans, avant que Bukowski ne la quitte, ne supportant pas ses sautes d'humeur et son tempérament. Il retourne à Los Angeles.
Il règle alors ses derniers comptes avec l'enfance. En 1958, son père meurt, quelques années après sa femme. Bukowski hérite de la maison, qu'il vend très vite. Il s'installe à Los Angeles, y recroise ses anciens compagnons de beuverie, dont Jane. Poussé par la nécessité, il réintègre les services postaux fédéraux.
Il y reste cette fois 12 ans. Cette période est aussi douloureuse que féconde : Bukowski s'astreint à garder son job et à écrire. Les petites publications se succèdent dans des revues plus ou moins obscures, et le nom de Bukowski commence à se faire connaître. Un premier recueil parait, Bukowski est invité à fréquenter des cercles littéraires, des écrivains, des éditeurs. Il déserte le milieu.
Il est publié dans The Outsider, revue plus largement distribuée, aux côtés de Allen Ginsberg, Jack Kerouac (qui vient de publier Sur la route), William Burroughs. La popularité grandissant, on lui propose des lectures dans les universités.
En 1964 naît la fille de Bukowski avec Frances Smiths, Marina. Bukowski, qui refusait toute idée de paternité , se consacre à sa fille, cherchant à lui éviter la vie de misère dont il commence à peine à se sortir.
En 1969 paraît son premier grand recueil de nouvelles et chroniques, sous le titre de Journal d'un vieux dégueulasse, courageusement publié par Lawrence Ferlinghetti, poète et éditeur Beat à San Francisco. Le recueil, tiré à 20 000 exemplaires, obtient un plus grand succès d'estime dans le milieu beat, ce qui vaut à Bukowski d'être vite assimilé à ce mouvement, ce qu'il rejette de ses dires et de ses actions. Bukowski n'a jamais connu les beats (il a tout au plus croisé Burroughs, beaucoup plus tard).
Cette publication correspond aux premières lectures publiques de ses poèmes par Bukowski, le plus souvent dans des BDE de faculté, des petits cercles littéraires, des bars. Il s'enivre avant chaque montée sur scène, ivre mort, déblatérant autant d'insultes que de poésies.
Le succès est là, Bukowski quitte la poste pour se consacrer totalement à l'écriture. Il livre alors son premier roman, Le Postier (1971), dans lequel il dépeint son quotidien d'employé des postes. Les 2 000 exemplaires s'écoulent très vite.
Il rencontre à cette période Linda King, artiste à ses heures, mère de deux enfants. Leur histoire est aussitôt excessive, parfois violente, avec alternance de ruptures, d'éclats de voix, et de coups de poings . Le vrai tournant littéraire a lieu en 1976, avec la publication d'un recueil de nouvelles Les contes de la folie ordinaire, peu autobiographique, et peu représentatif de l'œuvre globale de l'auteur.
En 1976, il rencontre Linda Lee, lors d'une lecture dans un bouge de L.A., 25 ans plus jeune que lui, qu'il finit par épouser. Cette jeune hippie, toute emprise de philosophie tibétaine, tient un restaurant macrobiotique à Los Angeles. Ils ne se quitteront plus.
Ressentant probablement un tournant dans sa vie sentimentale, Bukowski attaque la rédaction de Women publié en 1977, épais roman autobiographique, quasi-pornographique, où il écrit les chaos de sa vie avec les femmes.
Vers soixante ans Bukowski s'installe finalement avec Linda, à San Pedro, Californie. Passé de la bière au vin, il écrit plusieurs poèmes par jour. Il vit de ses droits d'auteurs et surtout de ses cachets de lectures publiques, mais ne renonce en rien à son train de vie . Le surplus d'argent est simplement redirigé vers les courses de chevaux. Sa célébrité internationale passe par l'Allemagne, et surtout la France — où trois de ses poèmes sont publiés par la revue The Star Screwer dès 1971, avant qu'il soit édité par les éditions du Sagittaire —, où sa mémorable apparition dans l'émission de Bernard Pivot Apostrophes (1978) le fait accéder immédiatement au statut d'écrivain culte : Bukowski, enivré, finit, encouragé par Bernard Pivot, par quitter le plateau, puis sort un couteau pour s'en prendre à une personne chargée de la sécurité ( l'intégrale de l'émission dans le documentaire de J. Dullaghan, Bukowski, disponible en DVD, version française sous-titrée).
Son succès en Europe devient colossal : la presse relate l'événement, Marco Ferreri adapte Les contes de la folie ordinaire au cinéma et plus tard Barbet Schroeder adapte un script de Bukowski dans Barfly avec Mickey Rourke dans le rôle de Henry Chinaski, qui sort en 1988.
Bukowski roule en BMW pour aller aux courses, épouse Linda Lee en 1985, publie ses derniers romans et poèmes.
Il meurt le 9 mars 1994 à San Pedro (Californie), d'une leucémie. On peut lire sur sa tombe l'épitaphe « DON'T TRY » (n'essaie pas).